De l’écriture inclusive...
Il est rare que j’utilise ce moyen d’expression qu’est le shaarli pour exprimer une opinion personnelle politique. Cela étant dit, il me semble qu’il n’existe pas d’autre espace de partage qui permette correctement l’exercice : l’opinion en 240 caractères ne saurait être qu’une réaction tronquée qui manque fondamentalement de substance. Et le blog, c’est pour raconter sa vie, et elle regarde que moi.
Je vais donc coucher mes idées comme elles me viennent et nous verrons ce que cela donne.
Le sujet de l’écriture inclusive m’est revenue encore récemment et je ne peux pas m’empêcher d’être gênée par l’expression qu’elle prend.
Pour faire court : Afin d’être le plus égalitaire, inclusif possible, il faudrait préciser le genre de toutes les personnes concernées. Donc ne plus dire :
Ils ont voté pour
Mais
Ils.elles ont voté pour
Plusieurs problèmes à cela :
- « Il » s’emploie pour un homme avec un penis, « elle » pour une femme avec un vagin. Car l’on exprime le sexe et non le genre. Le genre en grammaire et orthographe française ne fait pas référence aux stéréotypes autour des sexes, mais bel et bien à l’emploi d’un pronom. C’est pour cela que l’on parle de LA chaise, et croyez moi, la chaise ne se maquille pas et ne porte pas de jupe. Erreur de semantique donc.
- en exprimant plus de genres que nécessaire, on exclue les non genrés et non binaires, donc on est pas inclusifs. D’ailleurs, les enfants sont-il genrés dans ce cas ? Je rappelle que lorsque l’on parle de genre, on ne parle pas de sexe, on parle bien de stéréotypes et attributs autour des-dits sexes.
- La distinction genrée homme-femme amène finalement la triste vérité : il faut séparer les deux catégories de population, elles ne sont pas égales et doivent être distinguées. Quelque chose d’inclusif aurait pu être d’inventer un nouveau pronom, équivalent du ‘it’ anglais comme eil (contraction du il et du elle) ou alors de supprimer un des deux genre, pour ne garder que le neutre (masculin), par exemple.
- A vouloir faire de l’égalité, on crée des inégalités. Supposons que vous indiquez sur votre plaque - site - cv : D. Truc, Doctoresse, alors vous permettez aux individus ayant un biais de genre (ex : les femmes sont nulles) de vous exclure de leur panel de docteur à consulter. Vous permettez aux autres de vous exclure sur le critère du genre. C’est l’inverse de l’égalitarisme et de l’inclusion.
Mais surtout, au delà de la pertinence du débat, cette polémique évoque chez moi trois pendants que je considère plus graves :
- ces luttes hommes - femmes crééent des camps en confrontation, exactement comme les luttes de racisme créent des confrontations entre personnes de couleurs différentes, retraites à privilèges ou régimes généraux... je ne vois que des moyens de diviser les populations sur des sujets de société qui manquent finalement un peu d’enjeux... lutter contre le sexisme c’est important, lutter contre le racisme c’est important, garantir des retraites pour tous c’est important. Faut-il utiliser il ou elle pour parler d’un groupe de personnes... bof bof bof... ça fait pas avancer le bateau et ça crée des tensions et des divisons, il me semble qu’on obtient moins d’inclusion non ? Garantissons dans la loi des sanctions pour ceux qui y dérogent, faisons appliquer les sanctions et garantissons la même justice pour tous.
- Ce genre de sujet sociétal prend énormément d’espace, au moins sur internet (je ne regarde pas la télé), occultant des sujets qui pourraient sembler prioritaire comme le fait que... je sais pas... l’Australie brule ?
- Enfin, la tyrannie des foules, telle que décrite par Tocqueville présente la description d’une société accordant toujours plus de pouvoirs à l’Etat pour mettre en place de l’égalitarisme, et ce, au détriment de la liberté. Par liberté, il faut entendre l’inverse de la tyrannie d’un despote, ce que redoute le plus Tocqueville, c’est un roi ou un gouvernement autoritaire. J’ai aussi l’impression que notre gouvernement joue la carte du « gauchisme societal » pour obtenir de la légitimité d’agir. En se faisant annonciateur d’égalité, il prend plus de pouvoir qu’il ne devrait et devient autoritaire, au point où le peuple, pour un peu d’égalité, perd beaucoup de liberté...
La question de la liberté et de l’égalité est centrale en ce moment. Revendiquer l’égalité devant la loi me semble pertinent, mais il devient difficile de soutenir que l’on peut aller plus loin.
Je n’ai pas les jambes d’Usain Bolt, le QI d’Enstein, le visage de Brad Pitt, et mes parents ne me transmettront pas plusieurs millions d’euros.
En quoi suis-je égal avec mon voisin ? Le prétendre reviendrait à nier le handicap, la maladie, la génétique et l’épi-génétique...
Mais cela reviendrait à admettre que tout le monde ne peut pas devenir millionnaire, et donc que les millionnaires ont profité d’un avantage inégal devant la vie. Cela revient à admettre qu’un chômeur n’est pas un profiteur mais un défavorisé devant la vie. Cela revient à admettre les plus riches ne sont pas plus méritants, ils ont profité d’un avantage inégal, et appelle un autre partage des richesses... Cela ramène une autre forme d’égalité, celle d’avoir le droit de vivre avec sa différence : cela s’appelle l’équité. Si on a trop d’égalité, on manque d’équité.
Aujourd’hui, dans la médecine psychiatrique, lorsque l’on parle des patients, on parle de personnes qui ont pété un plomb, incapables de rentrer dans un cadre. Ces gens dysfonctionnels, on passe plus de temps à les medicamenter, qu’à les écouter, de toutes façons on a plus de moyens pour ça. Un individu inadapté est plus commode qu’un cadre de vie inadapté, qui suppose de revoir tout le système.
Pour résumer, le débat sur l’écriture inclusive me semble être le fait d’une occupation de l’espace médiatique, à grands coups d’interprétations libres et de manipulations basiques (non le masculin ne l’emporte pas sur le féminin ! Non nous ne sommes pas tous égaux.) afin de nous orienter vers des divergences et des clivages sociaux. Arrivent alors des partis qui profitent de cette tyrannie des foules et, se prônant pour « un égalitarisme de gauche », en profitent pour récupérer plus de pouvoir qu’ils ne le devraient.
Bref, l’écriture inclusive, je trouve pas ça très intéressant.